L’argent règle (presque) tout :
L’argent est le moyen privilégié de réparation.
Il me semble qu’un Américain (en particulier lorsque vous êtes engagé dans une
transaction avec lui) ne dit pas forcément et pas facilement « j’ai eu
tort », ou « ceci a dû vous causer un préjudice » mais passe
directement à la case payer pour réparer l’erreur ou le manquement. La notion
de réparation par l'argent est très présente. Si vous avez subi un dommage ou
un préjudice (évidemment mineur, dans les cas que j'ai connus) on vous
propose très facilement de l'argent comme compensation/réparation. Cela
m'est arrivé de nombreuses fois : un achat par internet non livré dans les délais
prévus, un article défectueux, voire un oubli dans la commande que j'ai passé à
la caisse d'un magasin d'alimentation par exemple. Aussitôt on vous propose une
compensation en argent (un rabais) ou en nature, régulièrement sans même
l’avoir demandé.
Et finalement la justice américaine
fonctionne aussi sur le même principe : l'argent peut tout réparer, ou du
moins c'est LA réparation qu'on vous propose, moyennant beaucoup de
négociations dans les cas les plus ardus.
Vision à long terme :
Les Américains, et en particulier les
commerçants américains semblent considérer les choses à bien plus long terme que
les français. Garder un client content ou soigner leur réputation semble
compter bien plus qu’en France. Cette importance accordée à la relation
clientèle rend évidemment l’acte d’achat bien plus agréable aux Etats-Unis
qu’en France.
Par exemple la plupart des magasins
(notamment de vêtements) sont tout-à-fait disposés à vous rembourser un achat,
dans un délai bien plus long qu'en France (généralement pendant 3 mois là où en
France on va rarement au delà d’un mois), et surtout même si vous n'avez plus
votre ticket de caisse (pour peu que vous ayez votre carte bancaire qui a servi
à l'achat), alors qu'en France, même avec la carte de fidélité, et même pour de
petites sommes c'est souvent inconcevable.
De plus cette approche est tout à fait
assumée. En effet, les rares fois où j’ai obtenu un rabais, ou un avantage
client quelconque en France, j’ai eu l’impression d’avoir reçu une
« aumône » ; on m’avait fait une faveur et on aurait aimé
m’entendre largement remercier. Ce n’est absolument pas le cas aux Etats-Unis.
La notion de la satisfaction client et de
la réputation d’une entreprise est d’ailleurs poussée bien loin. Un exemple parmi d’autres : nous
avons ramené nos meubles achetés à Baltimore par un déménagement lors d’un
transfert par bateau. Les meubles sont arrivés bien après nous (le voyage par
bateau est bien plus lent qu’en avion !) et bien que la 1e
partie du déménagement (entre Baltimore-New York-Londres) se soit parfaitement
passée, il y a eu plusieurs anomalies et problèmes avec la partie
« anglaise ». Nous nous sommes plaints conjointement à l’entreprise
américaine et à son contractant anglais. Mais alors que la compagnie anglaise
nous a envoyé des explications laborieuses et tendancieuses, l’entreprise
américaine nous a envoyé un chèque. On ne peut raisonnablement pas penser que
le déménageur américain espérait nous voir retourner lui acheter un
déménagement de si tôt ! Pourtant son geste commercial était probablement
motivé par le souci d’éviter des avis négatifs sur internet de notre part.
Efficacité :
En matière d’argent comme en toute chose on
est rapidement fixé avec les Américains. Que la réponse soit oui ou non, il ne sert à rien de
discuter. Si vous avez droit à quelque chose (rabais, dédommagement, etc.), on
vous le propose très vite. Et si on vous dit non, c’est en général que vous
êtes dans votre tort. Alors que c’est tout l’inverse en France : on
commence généralement par vous dire non (éventuellement en mentionnant les
« règles ») puis si vous insistez, et si pour une raison ou pour une
autre on veut vous faire une faveur, au bout d’un temps (parfois très long) le
non devient oui.
Voici un exemple de la célérité avec
laquelle aux Etats-Unis on traite les réclamations : après notre départ
des Etats-Unis, nous avons reçu une dernière facture de notre opérateur
téléphonique. Pourtant la ligne avait bien été fermée et la dernière facture
bien reçue depuis un moment. La somme qu’on nous réclamait était d’environ $20.
Lorsque je les ai appelé, ils ont justifié cette facture par notre demande de
retarder la date de la coupure de la ligne d’un jour (car le dernier nous
étions sans téléphone). Or cette demande dans les faits n’avait pas été honorée.
Au moment où j’appelais, je n’avais aucun moyen de le démontrer. Pourtant
l’opératrice a pu très vite vérifier qu’aucun appel n’avait été reçu ni passé
ce dernier jour. Elle m’a alors demandé de régler $10 correspondant aux taxes,
réclamés par l’Etat. J’ai refusé et au lieu de me parler de
« règles », de « l’informatique » et du fait qu’elle n’y
pouvait rien (comme c’est le discours habituel en France), elle m’a dit
« ok, je crédite votre compte artificiellement de $10 afin d’établir la
balance ». Et voilà, c’était réglé en quelques minutes !
Pas de position de principe /
pragmatisme :
Quand vous formulez une demande de geste
commercial en France, vous entendez souvent l’argument de « la
loi » et de « principe » en appui au refus qu'on vous oppose.
Il en va tout autrement aux Etats-Unis. Pas une seule fois on ne m’y a servi
l’argument des règles, ni pour un refus, ni pour un accord sur une réparation.
Je ne sais pas jusqu’où vont les règles là-bas, mais j’ai souvent constaté que
(presque) tout se négocie. C’est une question non pas de principe mais
d’opportunité.
C’est ainsi que même notre banque
américaine nous a fait grâce de pénalités. En effet à la suite d'une
fraude constatée sur une de nos cartes
de crédit aux USA (qui a mis du temps à être réglée), et par un concours de
circonstances, nous avons tardé à rembourser un crédit (légitime celui-là). Le
temps de nous rendre compte de l'erreur, il y avait déjà $250 de pénalités à
régler. Nous nous en sommes rendu compte en France. Et avons appelé la banque
qui très rapidement nous a proposé un compromis très avantageux. Je pense
sincèrement qu'il aurait été bien plus difficile d'obtenir une diminution de
frais dans une banque en France.
A l’inverse le rapport de force peut aussi
jouer contre vous. Par
exemple nous avons été sollicités pour payer un impayé (je vais développer un
peu plus loin), un an après, avec d’importants frais. En effet, lorsqu’en mars
2014 mon mari et moi avons fait changer de crèche à notre fils qui avait alors 3
ans, nous avons écrit une lettre de préavis (2-week notice) mais avons
attendu de recevoir une facture pour ces 2 semaines, facture qui n’est jamais
venue. La somme due était d’environ $320. Or nous avons reçu il y a quelques
semaines cette facture envoyée par un organisme de recouvrement, avec $100
supplémentaires de frais. Lorsque je les ai appelé pour contester les frais
j'ai reçu un refus poli mais ferme. Je ne sais pas si on aurait pu refuser les
frais (pas la somme initiale due) et quelles auraient été les suites. Mais nous
avons préféré payer le tout et régler l'affaire définitivement.
Ce pragmatisme et cette malléabilité des
Américains a donc aussi son revers : pas facile pour une non-initiée
d’identifier les règles et donc ses droits !